mardi 8 janvier 2013

Skier en sécurité après la série noire de Noël


Skier en sécurité après la série noire de Noël

MONTAGNE

C'était le premier jour de ski pour ce skieur, mais son genou n' a pas supporté la première chute./ Photo DDM, P.C. - Tous droits réservés. Copie interdite.
C'était le premier jour de ski pour ce skieur, mais son genou n' a pas supporté la première chute./ Photo DDM, P.C. ()
C'était le premier jour de ski pour ce skieur, mais son genou n' a pas supporté la première chute./ Photo DDM, P.C.
Quatre personnes ont trouvé la mort entre le 22 et le 29 décembre dans des stations des Pyrénées. Une tragique série noire qui rappelle aussi qu'aucune sortie n'est anodine en montagne, malgré les progrès de la sécurité.
Mercredi 26 décembre 2012, domaine du Tourmalet dans les Hautes-Pyrénées. Sur une piste bleue, un surfeur espagnol de 26 ans tente un saut périlleux et se brise les cervicales en retombant. Même jour, dans les Pyrénées-Orientales : un adolescent de 14 ans se tue en percutant un arbre à Saint-Pierre del Forcats. Ax les Trois-Domaines en Ariège, ce samedi : apparemment gênée par un autre skieur, une débutante trouve la mort sur une piste verte en heurtant violemment un poteau.
Si l'on ajoute à ces trois accidents celui, rarissime, d'un skieur de 18 ans ayant chuté le 22 décembre d'un télésiège à Gourette, dans les Pyrénées-Atlantiques, et décédé à la suite d'une complication pulmonaire liée à son état critique, la première semaine des vacances de neige a définitivement pris une dimension tragique, dans les Pyrénées, cette année.
«Mais de là à extrapoler, dire que les sports d'hiver sont plus dangereux qu'avant, il y a un pas à ne pas franchir : chaque accident est particulier, a sa propre génèse», rappelle un gendarme de haute-montagne... qui, à l'instar de tous les secouristes professionnels n'en relève pas moins une profonde évolution du risque dans les stations, depuis 10 ans.
«Car le paradoxe, c'est que l'amélioration des pistes et du matériel génère aujourd'hui des accidents plus graves alors que les stations ont fait de gros efforts sur la sécurité», relève le lieutenant Julien Passeron, commandant de la section montagne des CRS de Lannemezan.
«Il y a de moins en moins de bosses, les gens prennent de plus en plus de vitesse, quand ils percutent, il y a de plus en plus de dégâts, nous rencontrons désormais une traumatologie plus grave, avec des fractures du fémur alors qu'avant, c'était surtout des entorses du genou», précise-t-il.
«On a des traumatismes de type «routier», du fait de la vitesse», confirme-t-on aussi, côté PGHM, en soulignant un autre cocktail détonnant. «Au ski, débutants et skieurs confirmés évoluent sur un domaine commun. Or les pistes d'apprentissage sont au pied des stations, là où tout le monde converge. Certes, les responsables de la sécurité font le maximum pour installer des chicanes, des filets et ralentir le flux, mais pour prévenir l'accident, c'est l'éducation à la cohabitation sur les pistes qu'il faut poursuivre, car en montagne, on ne peut pas tout sécuriser, tout aseptiser» conclut ce gendarme.

Nivellement par le bas...

Chez les professionnels de la montagne, un constat revient de saison en saison. «Il y a de plus en plus de monde sur les pistes, mais avec une évolution de la clientèle aussi. Les cours de ski représentant un budget, on préfère de plus en plus s'en passer en croyant que le matériel fait tout. Et quand on apprend, seul, sans moniteur, on apprend mal. Pas de bases techniques, pas d'éducation au «skier ensemble»: on assiste à un véritable nivellement par le bas», estiment nombre de secouristes.
«Globalement, le nombre d'accidents reste stable, mais on constate des accidents plus graves.»
Dr Jean-Dominique Laporte, association des Médecins de Montagne

Le chiffre : 12

mille>accidents de ski par an dans les Pyrénées. C'est l'estimation donnée par l'association des Médecins de Montagne, qui en totalise environ 140 000, en moyenne, dans les 280 stations de sports d'hiver que compte la France.

«Le skieur doit savoir adapter sa vitesse»

Il vient du plat pays. De Bruxelles, exactement. Mais c'est un passionné de montagne. Depuis six ans, le Dr Olivier Decoster est donc l'un des deux médecins officiant l'hiver à Peyragudes. «La station a fait le choix d'avoir un cabinet médical ouvert au pied des pistes. Elle me loge et me fournit cet outil de travail, doté d'une salle de radiologie, ce qui me permet de traiter directement une majorité de blessés qui n'iront pas encombrer les urgences» explique-t-il, installé au rez-de-chaussée du bâtiment des pisteurs.
Ses débuts dans les Pyrénées ? Ce généraliste, bon connaisseur de la traumatologie, n'est pas près de les oublier. «Je venais d'arriver, c'était le premier jour d'ouverture de la station et j'ai été appelé sur une collision : le skieur était mort», se souvient-il. Ajoutant «terrible, mais l'exception».
«L'an passé, sur 950 blessés, je n'ai appelé que 40 fois l'ambulance, ce n'est pas beaucoup» relativise-t-il d'ailleurs, en suivant. «C'est le double intérêt d'avoir un cabinet médical dans la station : c'est bon pour le patient qui est pris en charge rapidement sur place et bon pour la collectivité car ça coûte moins cher qu'en institution hospitalière», souligne-t-il. Quant au constat qu'il dresse sur l'accidentologie, il est clair. «Au ski, la règle c'est que le skieur doit savoir adapter sa vitesse à son niveau et aux circonstances. Or le problème majeur, c'est qu'on glisse de plus en plus vite, aujourd'hui, et qu'on voit de plus en plus de personnes arriver sans jamais avoir skié, entraînées par des amis qui leur disent qu'avec les skis paraboliques ça tourne tout seul et qu'ils vont apprendre en deux descentes. Personnellement, cette irresponsabilité me révolte, car ces débutants se laissent entraîner, sans savoir s'arrêter, jusqu'au moment où ils rencontrent un obstacle et finissent plus ou moins gravement blessés», explique le Dr Decoster qui en appelle juste au «bon sens».
Préparation physique, bonne alimentation au petit-déjeuner pour «éviter le coup de barre avec son pic d'accidents à 11 h 30» et connaître ses limites pour ne pas faire «la descente de trop en fin de journée»… «Il faut aussi savoir que la gravité des accidents varie en fonction de la neige. Ce message s'adresse surtout aux jeunes snowboarders : lorsque la neige est dure comme en ce moment, mieux vaut faire du ski que du surf pour éviter la véritable «épidémie» de fracture des poignets que je constate actuellement et bien sûr, toujours protéger sa tête avec un casque».
P.C.
Pierre Challier

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