samedi 13 octobre 2012

Réinsertion. L'échappée belle de treize détenus à vélo


Réinsertion. L'échappée belle de treize détenus à vélo

PUBLIÉ LE 23/09/2012 07:05
La prison, ce n'est pas que la sanction, c'est aussi l'insertion et le sport permet de reconstruire des notions de règles, de confiance, de dépassement de soi. Photo P.C. - Tous droits réservés. Copie interdite.
La prison, ce n'est pas que la sanction, c'est aussi l'insertion et le sport permet de reconstruire des notions de règles, de confiance, de dépassement de soi. Photo P.C. ()
La prison, ce n'est pas que la sanction, c'est aussi l'insertion et le sport permet de reconstruire des notions de règles, de confiance, de dépassement de soi. Photo P.C.
Tout autour de «Sosso» et JeanPierre se dresse la montagne ariégeoise, grandiose sous le soleil. Encore un effort, le col de la Core n'est plus très loin. 1 395 mètres… Le dernier de la journée après Menté et le Portet d'Aspet. Ultimes et rageurs coups de pédales… ensuite ils dévaleront vers Seix, l'espace grand ouvert. Comme un avant-goût de liberté sous leurs roues, pour eux qui ont quitté leur prison de Seysses et Saint-Sulpice le temps de cette échappée ? «Je ne vois rien du paysage. ça fait tellement mal quand ça grimpe que je ne pense qu'à l'effort», lâche Jean-Pierre en secouant la tête, Sosso restant «dans
[sa] bulle». «Ne jamais poser pied à terre» se répètent-ils tous en boucle, dans ce peloton d'environ 35 cyclistes. Vendredi 21 septembre… Depuis lundi, ils sont ainsi 13 détenus de Béziers, Carcassonne, Lannemezan, Seysses, Saint-Sulpice, Montauban, Muret, Perpignan et Tarbes à enchaîner avec une vingtaine de surveillants les ascensions les plus dures pour cette transpyrénéenne en forme de première : un raid cyclosportif d'insertion organisé par la Direction interrégionale des services pénitentiaires (DISP) de Toulouse.

Fiers d'eux

«Au début, on m'a traité de fou. «Tu n'imagines pas faire ça avec des types qui n'ont jamais fait de vélo ! ?» m'a-t-on lancé. Mais ils vont au bout d'eux-mêmes et on est très fiers d'eux» se réjouit Bertrand Schneider, chargé des sports à la DISP qui porte le projet depuis le début en partenariat avec la Fondation de la Française des Jeux et le Comité de cyclisme Midi-Pyrénées.
Départ de Saint-Jean de Luz pour atteindre Canet en Roussillon ce dimanche, avec, entretemps, 15 cols mythiques au menu, dont l'Aubisque et le Tourmalet… «On a commencé l'entraînement en avril», explique Jean-Pierre. «Et je ne pensais pas y arriver» avoue «Sosso». Mais ils ont finalement cumulé 3 000 à 4 000 km avant d'attaquer. «Et il faut remercier les juges pour les 500 permissions de sorties qu'ils ont accordées, depuis mars, afin qu'on puisse réussir», souligne Bertrand Schneider.

Pignon sur route

Souffle à retrouver, entrecuisse à tanner… le vocabulaire même du vélo est alors presque devenu une métaphore de leur parcours personnel. Remise en selle, cadre qui porte, chaîne qui affranchit, pignon sur route en attendant de le retrouver sur rue pour ne plus dérailler…
«Le vélo c'est la souffrance, donc le combat contre soi-même pour la dépasser. Il permet de travailler positivement son image et s'ils ne lâchent pas, c'est aussi pour ne pas nous décevoir, parce qu'ils savent la confiance et les efforts investis en eux», confie Jean-Philippe, de l'administration pénitentiaire, qui pédale en binôme avec l'un de ses détenus.
650 km en tout… Aujourd'hui, ils seront rejoints par cinq autres détenus des Pyrénées Orientales pour l'étape finale… mais avant, ils auront connu le Tourmalet par 4°c et les cuisses comme du bois avec, heureusement, les mains des pros de l'Institut Toulousain d'Ostéopathie pour les soigner… «C'est bluffant ce qu'ils ont réussi» conclut Bernard Schneider. «Mais je pense que je ne le ferai qu'une fois», lui avoue Jean-Pierre. Heureux pourtant, «parce qu'il y a un avant et un après. Maintenant, je suis serein.»
Pierre Challie

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